« Je fais une chose, oubliant les choses qui sont derrière et tendant avec effort vers celles qui sont devant, je cours vers le but pour le prix de l’appel céleste. » (Philippiens 3:14)
L’apôtre Paul compare ici la vie chrétienne à une course. A son tour l’enfant de Dieu désirant répondre à cet appel s’engage à courir vers le but. Encore doit-il au préalable discerner la direction qu’indique le Saint-Esprit ! Mais comment savoir en reconnaître l’inspiration ?… Cette question invite à considérer l’exercice du discernement, utile avant tout pour éviter l’écueil fréquent de la précipitation. Il s’avère salutaire en effet, devant une alternative, de marquer une pause pour se mettre à l’écoute de l’Esprit. Cela répond à l’injonction biblique : « Bien-aimés, ne croyez pas tout esprit, mais éprouvez les, pour voir s’ils sont de Dieu » (I. Jean 4:1). L’obéissance à cet avertissement suscite une attitude d’humble confiance filiale agréable au Père. À l’exemple de l’enfant Samuel, invoquons notre Seigneur d’un cœur, ouvert et réceptif : – « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute. » (I. Samuel 3:10). Dans ces conditions l’exercice se montre particulièrement opportun pour s’enquérir de la volonté de Dieu. Néanmoins la pratique ne va pas sans difficultés. Il convient d’en préciser les limites ; notamment, sous couvert de soi-disant spiritualité, la tentation de négliger le devoir quotidien. La crainte de l’échec également qui, conduisant au découragement ou à des hésitations paralysantes, empêche souvent de parvenir à une décision. À cela s’ajoute un danger plus insidieux, la Bible nous en averti : « Mais je crains que, en quelque manière, comme le serpent séduisit Eve par sa ruse, ainsi vos pensées ne soient corrompues et détournées de la simplicité quant au Christ. » (II. Corinthiens 3:11). Ce passage met en relief le péril de séduction par l’adversaire ; en outre, il dévoile clairement l’origine du problème : le manque de simplicité ; autrement dit le péché, sans doute inavoué, de suffisance ! Cela définit les limites de l’exercice spirituel, sa valeur dépendant des dispositions intérieures. La question du discernement apparait alors cruciale. Elle incite chacun à s’interroger sur ses motivations profondes en priant comme David : – « Sonde-moi, Ô Dieu ! et connais mon cœur ; éprouve-moi, et connais mes pensées. » (Psaume 139:23). Caïn et Abel présentèrent tous deux une offrande à Dieu, « mais il ne porta pas un regard favorable sur Caïn » (Genèse 4:5). Pourquoi l’offrande d’Abel s’avérait-elle plus acceptable que celle de Caïn ?… Il faut chercher la raison de la préférence divine dans la divergence entre les dispositions intérieures des deux frères. « C’est par la foi qu’Abel offrit à Dieu un plus excellent sacrifice que Caïn. » (Hébreux 11:4). Dès l’origine, se révèle ainsi la différence fondamentale entre les cultes inspirés par une humble confiance et ceux dictés par un froid formalisme. Cela nous pousse à implorer avec le psalmiste : « Crée-moi un cœur pur, Ô Dieu ! et renouvelle en moi un esprit droit. » (Psaume 51:10). Caïn ne s’efforçait-il pas d’accomplir un devoir religieux légitime ? Ne se montrait-il pas en cela méritoire ? Toutefois son approche, fondée sur ses propres œuvres, « les fruits de la terre »(Genèse 4 :3), ne s’accordait pas au désir de Dieu. En revanche, Abel, au bénéfice du sacrifice d’un agneau, répondait entièrement à la grâce. Ainsi, nous-mêmes, rachetés par le sang du Christ « l’Agneau sans tache » (I. Pierre 1:19) sommes désormais agréés de Dieu. Loin d’aspirer à nous justifier sur le principe des œuvres, notre désir de nous conduire selon la volonté divine manifeste l’amour d’un cœur reconnaissant, et non l’expression d’une crainte servile ou d’une recherche de mérite. « Nous l’aimons, puisque lui nous a aimés le premier. » (I. Jean 4:19). Or la preuve que Dieu nous aime, « c’est que Christ, alors que nous étions encore pécheurs, est mort pour nous » (Romains 5:8). Sur la base de cette œuvre unique accomplie à la croix, la condition se trouve établie pour s’engager dans la vie chrétienne. S’ouvre alors la perspective de notre orientation pour discerner l’appel personnel du Christ : – « Toi, suis-moi ! » (Jean 21:22)
Jean-Michel ARDOLADE